Les Français comptent sur l’Etat pour financer leur dépendance
Selon une étude de l’Insee, les ménages ne sont pas encore prêts à s’assurer contre le risque de dépendance.
Quelle place occupera pour les prochaines années la prévoyance individuelle dans la prise en charge des personnes agées en France? Conformément à une étude Economie et Statistiques de l’Insee parue ce jeudi, «malgré les restes à charge pour les familles potentiellement conséquents, peu d’individus disposent à ce jour d’une couverture assurantielle». Plus affolant, encore, les perspectives de développement de l’assurance privée pour couvrir ce risque semblent limitées. Suivant les simulations de l’Insee, le taux d’équipement ne dépasserait pas 20% de la population, ce qui fait de facto reposer l’effort de financement et de prise en charge sur l’Etat.
Or la dépendance est une bombe à retardement pour l’économie française. «Les besoins de financement du risque dépendance seront, selon toute vraisemblance, supérieurs à ceux du risque retraite après 2050», estime l’Insee. Un constat peu réjouissant à l’heure où les partenaires sociaux ont déjà du mal à sauver les régimes de retraite complémentaires au bord du précipice.

Au 1er janvier 2012, la France métropolitaine comptait 1,17 million de personnes âgées dépendantes au sens de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), bien 7,8% des 60 ans ou plus. À l’horizon 2060, selon le scénario intermédiaire des projections de dépendance, ce nombre bondira à 2,3 millions.
Cependant, les ménages ne semblent pas prendre en compte ce risque dans leurs projections de dépenses à long terme. Car, selon l’étude de l’Insee, encore relativement peu de personnes détiennent à ce jour d’une assurance qui les couvre en cas de dépendance (l’Insee avance le chiffre de 2 millions de personnes assurées à long terme). Et pour l’avenir, «le recours accru à la prévoyance individuelle par le biais d’une généralisation des couvertures assurantielles privées apparait difficilement envisageable, à moins d’une forte évolution de l’offre d’assurances ou de l’instauration d’une assurance obligatoire», constate l’Insee.
Des «restes à charge» élevés
Toutefois la prise en charge des personnes dépendantes est un vrai coût. Elle était évaluée en 2011 à 28,6 milliards d’euros soit 1,41 point de PIB, souligne l’Insee, dont une large valeur à la charge de l’Etat (plus de 21 milliards). Avec autant, «les restes à charge» n’en demeurent pas moins élevés pour les familles dont un affilié a besoin d’une aide dans l’accomplissement des actes de la vie quotidienne.
L’Insee recense plusieurs degrés de reste à charge: 396 euros par mensualité en moyenne avec les bénéficiaires de l’Apa ; 692 euros pour les personnes ayant les plus forts degrés de dépendance (elles sont classées en GIR 1 et GIR 2) ; 1486 euros pour une personne placée en institution spécialisée. Dans le cas des malades atteints d’Alzheimer, les reste à charge s’élèveraient à 570 euros à domicile et 2300 euros en institution.
«Cette myopie» ou ce «déni» des ménages face à la dépendance est plus ou moins consciente. L’Insee souligne «l’éloignement temporel entre la décision de souscrire une assurance et la survenue du risque». Il est vrai que quand une personne s’assure à 50 ans, ce n’est que 30 ans plus tard, vers l’âge de 80 ans qu’elle pourra en avoir besoin. Encore communément, les gens n’envisagent tout simplement pas ce risque: quatre sur dix ne sentent pas concernés par ce problème et ne développent en conséquence aucune stratégie de couverture. Cette proportion varie néanmoins si l’on a eu dans son entourage une personne dépendante: dans ce cas, six personnes sur dix se disent concernées par le sujet. Néanmoins surtout, beaucoup de Français comptent sur l’Etat providence pour financer leur dépendance ou se considèrent naturellement couverts contre ce risque par leur complémentaire santé ou leur assurance prévoyance. Il y aura donc dans les prochaines années un gros travail d’information à faire sur ce point, autant de la part de l’Etat, qui ne pourra pas tout solder, que des opérateurs privés.
[ad_2]